Les guapitos Cap Horniers!, par Captain ficelle

Publié le par L'Amérique Latine de Guapita

Tout d'abord c'était un Mardi 31 Janvier que nous appareillâmes pour notre dernière descente vers le sud et ce dernier bout de terre avant l'Antarctique, l'Isla Horn. En regardant le fichier météo, les conditions ne sont pas bonnes, le vent rentre fort, mais il semblerait qu'il y ait une fenêtre pour jeudi vendredi; allez, on tente. Les gens avec qui on a sympathises nous saluent, l'équipage sourit, on est chaud!

Nous avons un vent correct au début de cette nav, la sortie de beagle et de paso Picton se fait avec 25nds. Il nous faut ensuite traverser la baie Nassau pour rejoindre notre mouillage sur Isla Lennox. Là nous rencontrons des conditions plus musclées avec 30nds établis mais surtout une mer creuse (3-4m). Nous sommes impressionnés par la puissance des vagues qui nous passent par le travers à une vitesse folle. Jonathan est de quart de barre à ce moment là et c'est le genre de conditions qui lui plaisent… C'est elle ou moi qu'il me dit! Quand au reste de l'équipage, ça prend du ris, 3 ris plus solent, et le capitaine regarde la mer sous le vent du bateau silencieusement… De temps en temps, Max me demande: "ça va Jean?" . Et je suis obligé de lui répondre avec un grand sourire :"oui oui, super!" histoire de ne pas transmettre le petit stress que j'ai à ce moment là. "Pourvu que le bateau arrive au mouillage avant que ça ne forcisse… Et l'autre en transe à la barre… Enfin, t es costaude Guapita..."
Et nous arrivons juste à temps. Nous sommes même obliger d'affaler 1mille avant de mouiller l'ancre tout la voilure, grain blanc du coin oblige.
Avec Baptiste, on mouille tout et même plus. L'ancre plate avec 30m de chaine, empenneler avec l'ancre Delta plus 15m de chaine et enfin 15m d'aussière de celle que Guapita a récupérée au Canal de Panama, le tout dans 4m d'eau..! Faut dire que le lieu et les conditions obligent le respect. Dans la nuit l'anémomètre se bloque à 40 nds avec des rafales enregistrées à 57nds. Le bateau est vite recouvert de grêle. Du coup, on se fait un petit rhum "on the rock"!

La journée du mercredi est à la même sauce sauvage. Guapita avec ses 60m de mouillage empennelé dégage une sensation de sécurité et il devient vite jouissif de contempler le déchaînement des éléments dehors, la tête sortie de la descente et les pieds au chaud, près du poêle à Kérosene. Vers le soir un bateau arrive au mouillage toujours avec beaucoup de vent. Les dauphins se mettent à sauter pour fêter leur arrivée sain et sauf. On s'échange les dernières infos météo, eux qui nous passen le dernier fichier grib, nous qui leur traduisons le bulletin espagnol de Lennox radio. Nous la VHF, eux l'Iridium, chacun son truc! Lorsque vers 21h00, Lennox radio nous contacte sur le 16 pour nous dire "Guapita, parece que han movido del ancrage". -" Non, non, l'alarme de mouillage n'a pas sifflée,….." Biiiip, Biiip. L'alarme de mouillage se met à siffler au moment même où je lui réponds! Du coup on remet 15m d'aussière histoire que l'ancre Delta ne fasse pas juste un poids mais accroche aussi. Le bateau ne bouge plus et ne bougera plus, mais c'est le genre d'évènement qui installe le petit doute pour une bonne nuit de sommeil…
33.-CapHorn-Ushuaia 2092
Le matin du jeudi 2 février nous appareillons à 7 heures avec un petit 15nds de Nord-Ouest. On pousse un peu avec le moteur pour être à l'heure avec le Horn. Navigation tranquille. On rentre en contact avec la radio de l'archipel Wollaston dont fait parti isla Horn et confirmons notre ETA (Estimated Time of Arrival) au Cap Horn pour 15 heures. Là nous commençons à apercevoir le fameux caillou de sa haute forme pyramidale. Nous passons Paso para el mar del Sur et c'est le début du tour. Nous avançons au près par 15-20 nds, les conditions sont idéales. Il n'y a pas le soleil, mais faut qu'en même pas trop abuser! Nous arrivons à la pointe ouest de l'île et là le vent faibli, trop d'ailleurs car nous avons une terrible réflexion de cette énorme houle qui arrive de l'ouest et qui nous offre une mer hachée au pas possible. Cette pointe Ouest est impressionnante, des cailloux en forme de dent de requin de 50 mètres de haut et le bateau comme une machine à laver. On est obligé de mettre le moteur, le vent n'étant pas assez fort pour nous appuyer. On avance ainsi dans une mer bouillonnante. Parfois on voit avancer une énorme vague bien plus haute que ses soeurs, dans les 10mètres. On se dit que ce doit être une de celles qui a fait le tour du globe avant de venir lever Guapita comme une brindille. Puis nous arrivons au cap. Et c'est partie pour la photo souvenir… Le caillou est impressionnant mais ça reste un caillou. C'est plus la sensation d'être là, par 55°59 S, de penser à tous ces bateaux qui sont passés par là ou qui n ont pas forcément réussi à passer, qui nous fait nous détacher de nous même, et qui nous fait planer, comme dans un de ces rêves où l'on vole. un mélange de bonheur et de respect avec une pointe de salade de pâtes...

33.-CapHorn-Ushuaia 2075On rentre en contact avec Radio cab de Horno à qui nous indiquons notre intention de navigation. "Nous ne pouvons pas descendre à terre faute de temps et d'après votre prévision météo, cette nuit ça va souffler fort et de Nord-Ouest en plus. Le vent semblerait tourner Sud-Ouest demain matin. On va donc attendre la bascule à caleta Martial, à 15 miles d'ici". " Ok, recibido Guapita, bueno navigation, cualquer requerimiento, mantenemos canal 16". C'est donc à Caleta Martial que nous fêtons avec un petit Rhum le tour du caillou, mais gentilment car demain, on appareille à 4heures pour profiter de la bascule de Sud-ouest qui ne dure pas et qui devrait forcir par le Nord-Ouest. A 4heures, on se lève avec Batiste et appareillons dans la foulée. Amarré à une bouée de l'armada Chilienne, on se fait un départ à la voile pour ne pas réveiller les autres qui prendront le quart suivant. C'est avec une jolie brise dans les fesses, le soleil voilé et les dauphins que nous commençons la navigation jusqu'à Puerto Williams. Puis à la sortie du canal Franklin, sous les vents des îles Wollaston, le vent rentre d'un coup. Pas de chichi, on prend immédiatement 3 ris et on arrise le Solent, le vent est de 35nds. Heureusement, il est de Sud-Ouest et donc nous retraversons le canal Nassau à fond les ballons, avec une moyenne de 7 nds. Tant mieux, c'est qu'il nous faut faire 90 miles aujourd'hui! Puis nous arrivons dans l'entrée du Canal Beagle, et là, c'est une autre partie qui se joue. Vent dans le nez, nous tirons des bords pendant 3 heures avant de pouvoir crier victoire. Dans cette partie de virement, on arrive à rester devant un énorme bateau à voile qui lui est au moteur. Puis finalement qui, nous voyant le narguer, finit par dérouler sont génois. A ce moment là, Guapita ne fait plus le poids et le laisse passer devant après avoir virer dans ses fesses dans le genre régate!
Malgré la fatigue de l'équipage, nous allons fêter le tour du Cap Horn au Micalvin le soir même, le bar du Yatch club installé sur un ancien bateau de l'armada où règne une ambiance vraiment sympa. Il y a même Jean, le capitaine du bateau voisin qui nous offre une grand crue de Bordeaux que nous savourons à 4 du mat' avec la dernière boite de pâté au foie de canard!
Le lendemain, c'est une bonne gueule de bois, du genre "à la Cap-Hornier" que nous avons!

P1010384

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
M
!!!BRAVO BRAVO !!! incroyable et félicitations
Répondre
J
Pour vous, respect du Horn, pour nous simple terriens, respect pour les Cap Horniers que vous êtes...
Répondre